vendredi 29.03.2024  

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Quartz Informatique Ural 13 Records
   
Interview Leandro Gámez - Fieber / Phont / Ongaku / Isoghi - SP 

Leandro est l'un de ces artistes déterminés à s'exprimer d'une manière très personnelle, en suivant son propre chemin. Depuis 1998 et ses premiers disques sur Ongaku, il ne s'est jamais arrêté et a défini un style très reconnaissable, deep & funky avec un sens très prononcé pour les mélodies. Son background espagnol lui a également permis d'avoir un grand sens du rythme et des percussions, tout comme de la plupart de ses compatriotes. Avec un grand nombre de maxis de qualité produits durant les six dernières années, il est maintenant meilleur que jamais. Et l'une des choses essentielles dans sa musique est précisément ceci : la qualité.

- Atome : Pourquoi as-tu décidé de te lancer dans la techno ?
- Leandro Gámez : Je ne me souviens pas exactement quand j'ai ressenti la techno pour la première fois. Peut-être lorsque je n'étais qu'un gamin et que je regardais "Stars Wars" ou "Blade runner"... Je ressentais ce que dégagent les films de science-fiction : ces atmosphères, paysages et environnements spéciaux, à la fois futuristes et électroniques, etc. Après cela, j'ai suivi toute l'évolution de la techno, depuis la techno pop de Depeche Mode jusqu'à la techno tribale ou la hard techno d'aujourd'hui. J'ai commencé à chanter et composer dans un groupe d'EBM à Madrid au tout début des années 90. Ensuite, nous avons découvert l'intelligent techno, la house music et la trance. Nous avons traversé tous ces styles ce qui fait qu'il ne m'a pas été difficile de commencer à faire de la musique tout seul. La techno est une sorte de seconde peau.

- A. : Qu'est il arrivé à Audiodrome? Pourrais-tu nous en parler et nous dire comment t'es venue l'idée de monter ton propre label ?
- L.G. : Audiodrome a été lancé à l'initiative de mon ami Big Toxic, un musicien et producteur de Madrid. Ce n'était donc pas un projet 100% à moi mais je dois reconnaître que j'ai fait le plus gros du travail qu'une personne peut faire pour un label, à savoir le A & R mais aussi tout ce qui concerne la relation avec le distributeur, bref presque tout... Le but principal de ce label était de mettre en avant, à l'époque, la scène techno espagnole et notamment des artistes comme Daniel Erbe (Patrick Dubois), Christian Wünsch, Mooz, moi-même ou des collaborations avec d'autres producteurs étrangers comme Random Noize. C'était très intéressant et cela m'a permis d'apprendre beaucoup sur le côté business, une chose qui n'est pas toujours très agréable à gérer.

- A. : Isoghi et son histoire.
- L.G. : Isoghi en est la continuation, un projet personnel de tout ce que je n'aurais pas pu faire sur Audiodrome. Je veux dire par là qu'il s'agit d'un label plus éclectique regroupant une fois encore différents artistes mais sans la nécessité de créer ou suivre un son particulier. Des producteurs comme Bando, Patrick Dubois, Danilo Vigorito ou Cio ont un son différent mais parfois des similitudes au niveau du style. En fin de compte, le plus important étant la qualité plutôt que le style. Jusqu'à aujourd'hui, nous avons sortis dix 12" et 3 cd's - un cd mixé, un album disponible uniquement dans ce format et une compilation spéciale composée de morceaux non publiés. Il est vrai qu'Isoghi s'est octroyé quelques mois de repos car je voulais terminer tout ce qui était planifié avec d'autres labels, mais j'espère bien relancer la machine l'année prochaine avec des maxi's tout frais.

- A. : Que penses-tu de la scène techno actuelle? Est-ce que le son rétro est la prochaine mode après le retour de l'electro, chronologiquement parlant et en ayant à l'esprit ton excellent EP 'Dibujos Reanimados' sur Phont ?
- L.G. : Si nous reconnaissons que l'electro clash est très tendance en ce moment, c'est parce qu'elle intègre des vocals et des mélodies... c'est toujours de la techno, comme il y en avait des années en arrière. Nous savons tous qu'il n'y a rien de neuf là-dedans mais cela ne nous empêche pas de l'aimer... Il y a pas mal de gens qui sont un peu fatigués de la techno tribale et de la hard techno (personnellement j'aime tout), ils cherchent de nouvelles sensations et les ont trouvées dans les morceaux de Vitalic, Northern Lite, Beroshima ou encore Ladytron pour n'en citer que quelques uns. L'évolution de la musique électronique orientée dancefloor semble s'être arrêtée il y a quelques années mais cela ne me dérange pas, j'ai toujours préféré les bons morceaux aux différents types de styles.

- A. : Comment ta musique a-t-elle évolué jusqu'à maintenant ? Tu as un style bien personnel. Comment le décrirais-tu ?
- L.G. : Il est difficile de décrire mon style depuis mes débuts. Je me souviens des trois 12" Ongaku 12" que j'ai réalisés sous le pseudo Cio et comment ils m'ont aidé à améliorer petit à petit le son que je voulais atteindre. Ce son était un mélange de techno tribale, deep & électronique. Je n'ai jamais été conscient de ce que je voulais vraiment faire car j'ai des goûts musicaux assez larges, d'ailleurs cela peut parfois poser quelques problèmes pour composer. C'est peut-être lorsque j'ai produit mon premier disque pour Phont Music ("That's because you are stupid") que j'ai choisi le chemin de la techno tribale & funky. C'est toujours le cas aujourd'hui, de temps en temps un peu plus dur et parfois un peu plus soft... cela dépend des jours et de l'humeur, des disques que je joue en tant que dj, bref de plein de choses.

- A. : Quelque chose à dire concernant tes apparitions sur le label allemand Fieber ?
- L.G. : Je considère, ou plutôt, je considérais Fieber comme mon tout premier label car celui qui l'a fondé, Oscar Comas, est un ami très proche. Après Ongaku, Fieber était l'étape suivante pour faire à nouveau de la musique sur un label que j'appréciais, un label regroupant de nombreux artistes et pas seulement une ou deux personnes. Sur Fieber, j'ai produit le maxi 12" que je préfère : "Who pays the price". Malheureusement ce label passe un moment difficile et je ne sais pas encore si Oscar continuera ce projet. Nous traversons une période de crise partout.

- A. : Qu'en est-il de ta collaboration avec d'autres artistes (avantages & inconvénients) et de ton utilisation de différents pseudos ?
- L.G. : J'ai réalisé avec Oscar de Fieber (sous le nom de Shared Work) une série de 12" intitulée "Cuba Libre" qui a remporté un certain succès. Trois maxis sont sortis sur Fieber et un autre sur Primevil. Plus récemment sur Isoghi, j'ai collaboré avec Daniel Erbe (Patrick Dubois) sur un projet appelé Minijack... Je trouve qu'il y a plus d'avantages que d'inconvénients à travailler à plusieurs car je pense qu'il est plus simple et plus amusant d'obtenir de bons résultats des machines avec un partenaire : deux points de vue valent mieux qu'un, quatre yeux et quatre oreilles aussi. D'un autre côté, quand on travaille seul, on a la liberté du choix, pas de prises de tête, tout nous appartient... la vie est ironique.

- A. : Qu'as-tu utilisé dans tes productions au début et à quoi ressemble ton studio aujourd'hui ?
- L.G. : Le premier synthé que j'ai acheté était un Yamaha Dx7. Quelques années plus tard, j'ai découvert que le sampling était génial et j'ai donc utilisé des samplers Emu, Ensoniq, Yamaha & Akai. A titre d'exemple, lorsque j'ai produit mes premiers maxis pour Phont, Superbra ou Fieber, mon studio était composé d'un sampler Akai 3000xl, d'un Korg Prophecy, d'un Roland jv-1080, d'un séquenceur hardware Kawai Q-80 et d'une table de mixage Mackie, le tout étant évidemment enregistré sur un DAT. Ensuite j'ai découvert les logiciels et là tout à changé. Quand je dis tout, il s'agit réellement de tout. Maintenant mon studio se compose d'un Imac avec Logic et d'un synthé Virus B.

- A. : Aujourd'hui les ordinateurs sont-ils capables de faire aussi bien que les synthés hardware ou manque-t-il encore un petit quelque chose pour arriver à un son similaire ?
- L.G. : Ils en sont évidemment capables. Comme je l'ai dit juste avant, j'étais un fan inconditionnel des machines hardware jusqu'à ce que les logiciels fassent leur apparition dans ma vie. Vous pourriez croire que le son d'un synthé analogique ou d'un sampler est plus brillant ou chaud mais ce n'est pas le cas. C'est assez incroyable mais quand on utilise un synthé virtuel et qu'on ferme les yeux, on ne peut pas faire de différence avec une vraie machine. De toute manière, je pense que la meilleure solution est de mélanger le meilleur des deux mondes. Parfois, je compresse le mix général d'un morceau à l'aide d'un compresseur analogique, à ce niveau on peut distinguer une différence. L'astuce est de savoir comment utiliser l'équaliseur, ce n'est pas toujours facile quand on n'est pas ingénieur du son.

- A. : Parle-nous de tes prochaines sorties et de ce que tu penses précisément du Phont 31 ? Marque-t-il un tournant pour toi ou s'agit-il simplement d'une expérimentation ?
- L.G. : Je pense que le Phont 31 "Dibujos reanimados" est un bon disque mais sûrement pas un tournant, même si c'est mon maxi préféré sur Phont Music. J'ai simplement essayé de faire un autre titre techno tribal & funky. Je ne sais pas comment produire des disques phares, je ne préfère pas y penser quand je compose de la musique, laissons faire les choses naturellement... En ce qui concerne les prochaines sorties, il y aura deux 12" sur un label français appelé Bullit, un sous-label de Zebra 3. Ils sortiront en Novembre puis au printemps 2004. Ces types savent ce qu'ils veulent et j'adore la musique qu'ils font, tout comme le projet qu'ils ont mis en place autour de leurs labels.

- A. : Que penses-tu du mp3 et de son impact sur le marché de la musique ? A-t-il une incidence sur les ventes de vinyles ?
- L.G. : L'industrie de la musique est en pleine crise, c'est un fait. Je crois que des gadgets comme Final Scratch commencent à réduire les ventes de vinyles. J'ai constaté que de nombreuses personnes qui souhaitent apprendre à mixer préfèrent investir dans Final Scratch car ensuite il n'est plus nécessaire de dépenser beaucoup d'argent dans les disques. Il est facile de récupérer une grande quantité de morceaux sur Internet ou à partir des disques de ses amis. Pour une question de goût, je préfère le son du vinyle à celui du mp3, dans ce cas, il est préférable de convertir les fichiers aux formats wav ou aiff. Ensuite il y a celui qui joue uniquement avec des cd's mais c'est juste un support différent du vinyle, un complément. Il n'est pas courant de voir un DJ mixer des cd's en matière de techno 4x4. J'aimerais acheter l'un des derniers cd players Pioneer mais juste à titre de complément. Je continuerai à acheter des vinyles car c'est le format que j'aime le plus. Pour l'instant, j'écoute des mp3 seulement sur mon ordinateur. A chacun ses préférences.

- A. : Quel est le rôle des producteurs espagnols dans la scène techno internationale ?
- L.G. : Nous savons tous que nous n'avons pas une énorme scène en Espagne. Néanmoins, nous avons quelques artistes connus comme Oscar Mulero, Bando, Christian Wünsch, Cristian Varela, Angel Molina, D'Wachman & HD Substance et peut-être Patrick Dubois or Paco Osuna... Nous avons besoin de plus de labels, distributeurs et media mais je suis certain que nous sommes sur la bonne voie.

- A. : Quelques mots pour la fin.
- L.G. : Je viens de regarder le film de Michael Moore "Bowling for Columbine" consacré aux problèmes d'armes aux USA (ce grand pays). Je recommande fortement à tous les visiteurs d'atome de voir ce chef-d'œuvre plein d'ironie.

- A. : Merci beaucoup pour cette interview.
- L.G. : Toutes mes félicitations pour le site.
mypage.bluewin.ch/PHONT-PAGE
Lesha, 23/10/2003

Leandro Gámez

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